250 ans d'histoire
L’Académie française été fondée en 1635 ; celle des Inscriptions en 1663 ; celle des Sciences en 1666. L’Académie de marine le fut un peu moins de cent ans plus tard, en 1752.

Le milieu du XVIIIème siècle constitue l’un des principaux tournants de la pensée européenne. On ne donne plus la première place à la théologie et à la métaphysique. On recherche moins la raison des choses que la connaissance des choses elles-mêmes, c’est-à-dire la nature et ses lois. On déserte le ciel au profit de la terre. Un immense enthousiasme secoue le vieux monde. On se proclame physiocrate, philosophe, c’est le temps des lumières.

La Marine ne se tenait pas à l’écart de cet épanouissement de l’esprit humain. Dès 1746, le capitaine de vaisseau Bigot de Morogue, théoricien de la tactique navale et grand expert en balistique, homme d'une grande curiosité intellectuelle et d'un goût marqué pour les sciences métaphysiques et physiques - il était correspondant de l'Académie des Sciences - avait pris l'habitude de réunir chez lui, à Brest, des officiers de vaisseau, des médecins, des ingénieurs, architectes ou constructeurs de navires, tous ardents propagateurs de l'esprit scientifique naissant et des idées nouvelles, afin d'étudier en commun les problèmes techniques et militaires dont leur expérience leur avait montré l'importance.

Ce groupe, qui comprenait notamment Duhamel du Monceau, inspecteur Général de la Marine et membre de l'Académie des Sciences, devait bientôt recevoir une consécration officielle et, le 30 juillet 1752, Rouillé, secrétaire d’État à la Marine, présentait au roi Louis XV la décision créant à Brest une Académie Générale pour tous les Ports, première appellation de la jeune compagnie. Ses liens avec l'Académie des Sciences étaient étroits, soulignant ainsi sa vocation première et, de 1752 à 1793, année de sa disparition, sur deux cents membres ayant appartenu à l'Académie, on relève trente-six noms de membres titulaires ou correspondants de l'Académie des Sciences.

Malheureusement, les guerres reprenant, les séances se raréfient et, dès 1763, l'Académie disparaît de fait, faute d'un secrétariat permanent.

En 1769, le duc de Choiseul-Praslin, successeur et cousin de Choiseul, décida de reconstituer l'Académie sous le titre nouveau d'Académie Royale de Marine, titre qui consacre ainsi son caractère officiel. Ses liens avec l'Académie des Sciences se renforceront encore jusqu'à son affiliation à celle-ci, en 1771, et dont elle va constituer en quelque sorte l'annexe brestoise. C'est la période la plus brillante, avec des noms étroitement associés à la guerre de l'indépendance américaine, comme Borda, Bougainville, Fleuriot de Langle.

La révolution, source de multiples bouleversements lui sera fatale et, le 8 août 1793, à l'initiative de l'abbé Grégoire, pourtant à l'origine de la création du Conservatoire des Arts & Métiers, la Convention supprime l'Académie Royale de Marine, ainsi que toutes les autres académies.

Revenant sur cette décision malheureuse, la Constitution de l'An III reconstitue les cinq académies de l'Institut de France, mais omet de mentionner l'Académie de marine. Il accueillera toutefois, dès sa fondation, une dizaine des académiciens de marine les plus notables, en premier lieu Bougainville.

Sous l'Empire, Forfait, puis le baron Dupin, tous deux membres de l'Académie des Sciences, tenteront de ressusciter l'Académie de marine tout en lui donnant un caractère plus pratique, estimant avec justesse que les recherches abstraites étaient davantage du ressort de l'Académie des Sciences. Ce sera en vain, et le silence de l'Académie de marine durera plus d'un siècle en dépit des efforts de quelques personnalités du monde maritime dans les années 1875/1885.

A l’Institut cependant, nombre de marins eurent leur place : en premier lieu à l’Académie des Sciences où entrèrent ainsi les amiraux Duperrey, Paris, Dupetit-Thouars, Mouchez, Fournier, de Jonquière ; les ingénieurs Dupin, Dupuy de Lôme, Daussy et Bertin. L’Académie française ouvrit ses portes à l’amiral Jurien de La Gravière et à Pierre Loti.

Sous l'action conjuguée d'éminentes personnalités, et notamment d'Adolphe Landry, ministre de la Marine (09.1920 à 01.1921), l'Académie de marine devait renaître après la guerre de 1914-1918 qui avait mis en évidence le rôle essentiel de la Marine pour maintenir les liaisons avec l'Empire et assurer la survie de la Nation. La séance inaugurale eut lieu le 28 octobre 1921 à la Sorbonne sous la présidence d’Alexandre Millerand, président de la République, assisté d’Adolphe Landry, devenu Président de la nouvelle institution.

Elle fut d’abord reconstituée sous la forme d’une association privée, régie par la loi de 1901. Mais ce ne fut qu’une étape et en 1926 elle accédait au statut d’établissement public d’Etat, investi de la personnalité civile. Par décret du 9 mars 1927, contresigné par Georges Leygues ministre de la Marine et Edouard Herriot ministre de l’Instruction publique et des beaux-arts, véritable charte de la Compagnie, elle fut dotée d’une organisation détaillée qui, pour suivre les évolutions du temps, fut modifiée plusieurs fois, par décrets, entre 1935 et 1977. Ses statuts actuels ont été fixés par le décret du 2 avril 1991, modifié depuis par décret 2000-1163 du 28 novembre 2000 et décret n° 2005-708 du 21 juin 2005.

Son recrutement s'est élargi, n'étant plus réservé aux seules personnes de la Marine de guerre en activité comme c'était le cas au XVIIIème siècle, et son champ d'intérêt également : elle couvre désormais toutes les activités à caractère maritime.

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