Voyages d'étude et visites

Voyage en Chine

Non inscrit C&M

Du 03-03-2005 au 12-03-2005

Extrait du BM n°7 d'avril 2005

Ce numéro du Bulletin mensuel contient un compte rendu – rédigé par l’amiral Jean-Pierre Beauvois, secrétaire général du voyage que l’Académie de marine vient d’effectuer en Chine à l’initiative du président Jean-Louis Guibert et qui avait été préparé, en séances publiques, par les conférences de l’amiral François Bellec et du professeur Pierre Trolliet.

Ci-dessous sont publiées les réponses de M. Jean-Louis Guibert à quelques questions relatives aux impressions que ce voyage a suscitées chez ceux qui y ont participé.

- Ce que l’Académie de marine a vu en Chine a-t-il justifié votre choix de cette destination pour le voyage d’étude en 2005 ?

Oui. Mais encore fallait-il avoir vu la Chine récemment, ce qui n’était pas le cas de l’Académie qui s’y était rendue il y a un quart de siècle. En réalité, le délai entre deux voyages doit être de moins de dix ans et plutôt de cinq si on veut pouvoir comparer et apprécier cette remarquable évolution. Comme je l’ai déjà dit, ceux qui le pourront et nos successeurs devraient donc y retourner dans cinq ans.

- Quelle impression avez-vous retirée de la façon dont la Chine aborde le shipping international ?

Comme elle aborde tout : avec clairvoyance, pragmatisme, travail et volonté. La Chine entre de plein pied dans ce que nous avons mis des années à élaborer et que nous n’avons toujours pas terminé.

- Les industries maritimes, au sens large de l’expression, paraissent-elles décisives pour la marche de la Chine vers le développement économique ?

Si elles ne sont pas vraiment décisives, elles sont sûrement indispensables. Comment, en effet, sans moyens portuaires et maritimes, pourrait s’écouler toute la production qui se développe à une vitesse étonnante, et pas seulement dans les provinces côtières, mais dans les multiples mégapoles, et même dans « l’arrière-pays… ». Souvenons-nous, à ce sujet, des propos du Professeur Trolliet évoquant les milliers de kilomètres navigables entre la mer et le barrage des Trois Gorges…

- Comment pourriez-vous qualifier la réalité portuaire chinoise ?

Elle est pratiquement inqualifiable à notre échelle. En une vingtaine d’années, le port « colonial » de Shanghai sera devenu l’un des plus grands du monde… La « course aux tirants d’eau » lui a fait gagner les rives du Fleuve bleu, jusqu’à l’île artificielle amarrée sur quelques îlots à 30 km d’un pont, déjà construit, du continent.
On peut voir plusieurs immenses terminaux avec des kilomètres de quais où il ne reste pas une place, les navires étant servis simultanément par plusieurs portiques cependant qu’une multitude d’élévateurs parcourent des parcs de conteneurs qui s’étendent à perte de vue et où les boites ne restent pas plus de trois à six jours. Quant à l’organisation du trafic, elle est assurée par un central informatique où des batteries d’ordinateurs gèrent vingt-quatre heures sur vingt-quatre la manutention, qu’il s’agisse de la destination ou de l’emplacement à bord en tenant compte de la nature de la marchandise et de son poids.

- Quelles places peuvent prendre, garder ou développer encore les intérêts maritimes français en Chine ?

Les entreprises françaises qui « marchent » le doivent à leur(s) dirigeant(s). La CMA CGM en est un exemple. Ayant « tout compris » et notamment que la transport maritime se résume pratiquement aux vraquiers (secs et liquides) et aux porte-conteneurs, les responsables de la compagnie ont investi dans le domaine de manière qu’elle soit présente partout et qu’elle soit connue de tous ses partenaires. On notera qu’elle dispose de plus de quatre cents collaborateurs rien qu’en Chine. Voir d’autres intervenants français dans ce domaine, cela relèverait de la gageure.

Compte-rendu

L’Académie de marine a effectué son voyage annuel en Chine du samedi 16 avril au lundi 25 avril 2005.
Sans négliger la Chine ancienne, l’objectif de ce voyage était de constater la surprenante évolution de la Chine qui étonne et préoccupe le monde occidental, et l’impact du « maritime » sur cette évolution.
L’organisation culturelle, touristique et logistique a été confiée à « La Maison de la Chine » dont la compétence et l’expérience pour l’organisation de voyages dans ce pays sont reconnues. Le bureau de l’Académie avait, quant à lui organisé les rencontres « professionnelles » avec notre représentation diplomatique et la compagnie de navigation CMA-CGM fortement implantée à Hong Kong.
Dès leur arrivée à Pékin, première étape du voyage, les participants se sont imprégnés de l’atmosphère de ce pays, en découvrant le modernisme envahissant, presque sans limites, de cette immense métropole, et la tradition qu’il faut aller chercher dans les sites historiques que l’Etat s’efforce toutefois de préserver, ainsi que dans la vieille ville où résistent quelques vestiges de l’habitat du passé. Ils ont ainsi pu visiter les temples des lamas, de Confucius, et du Ciel, entourés de gigantesques jardins, et bien évidemment l’immense Cité Interdite précédée par la non moins vaste place Tien An Men. Une journée a été consacrée à la Grande muraille et à la Voie Sacrée qui conduit aux nécropoles des treize derniers empereurs Ming.
L’ambassadeur de France a reçu la délégation de l’Académie en sa résidence, au cours d’un coquetel qui a permis à chacun de rencontrer des représentants de la communauté française, et de mesurer ainsi l’étendue du bouleversement économique qui secoue le pays, et dans lequel l’énergie de nos représentants et entrepreneurs s’emploie activement à développer la place de la France.
L’étape suivante a eu Shanghai pour cadre. L’impression d’un développement sans limites y est encore plus forte qu’à Pékin, et la découverte des sites traditionnels tels que le jardin du mandarin Yu et du temple de Bouddha surprenante au milieu d’un urbanisme déchaîné. Shanghai est un véritable musée de l’architecture, entre les bâtiments des anciennes concessions internationales qui bordent le Bund, les premiers gratte-ciel datant des années vingt et la profusion de ceux qui fleurissent de jour en jour sur les deux rives du fleuve Huangpou. Une ascension de la tour de la perle et de l’orient, l’une des plus haute du monde, a permis, grâce à une vue exceptionnelle, de prendre la mesure du développement de cette cité qui n’a plus rien à envier à ses concurrentes asiatiques ou occidentales. La nuit tombée, le spectacle de toutes ces tours illuminées est fascinant.
Le gigantisme de cette ville qui s’étend sur les deux rives d’un fleuve, sillonné par une multitude de navires, barges et sampans n’était qu’un aperçu du développement d’un port qui vient de ravir le premier rang à Rotterdam. Grâce à la mission économique française de Shanghai, les participants ont pu se rendre sur l’un des cinq terminaux de conteneurs qui, trop à l’étroit sur les rives du fleuve historique, longtemps occupées par les concessions internationales, se sont établis à plusieurs dizaines de kilomètres à l’embouchure du fleuve et sur les côtes de la mer de Chine. Après un exposé par l’un des directeurs du complexe portuaire, la visite du terminal de Pudong a permis aux participants de mesurer l’ampleur des réalisations qu’a entreprises la Chine nouvelle. Depuis la tour de contrôle de ce terminal, la vue s’étend sur des kilomètres d’entassement de « boites » extraites des sept navires alors à quai et surmontés par un nombre impressionnant de portiques. Mais, semble-t-il, cette réalisation ne serait qu’un aperçu d’un programme qui s’achèvera avec la réalisation très prochaine du terminal de Yangshan, s’appuyant sur une île reliée à la terre par un pont de trente kilomètres déjà achevé.
La même impression a ensuite été ressentie à Hong Kong, tant pour ce qui concerne le développement et la richesse de la ville qui, par manque de place gagne chaque jour sur la mer la base de nouveaux gratte-ciel, que par l’extension de son terminal de conteneurs qui n’a rien à envier à ceux de Shanghai et qu’il a été rendu possible de visiter grâce aux représentants de la compagnie CMA-CGM, très présente dans toute la zone asiatique. Un exposé dans le centre informatique de gestion du terminal HIT a permis de répondre à toutes les questions que chacun peut se poser sur la manière dont est traité le mouvement très complexe de tous ces conteneurs, en fonction de leur place à bord des navires, de leur contenu, de leur destination et de bien d’autres paramètres qu’un cerveau humain aurait bien du mal à intégrer sur une telle échelle. Mais cet aspect futuriste n’a pas érodé le souhait des participants d’avoir une vision plus traditionnelle de Kowloon et de l’île de Hong Kong, et ils en ont été satisfaits en sillonnant leurs rivages et le port d’Aberdeen à bord d’une jonque, ainsi qu’en allant flâner dans le marché aux oiseaux, le marché aux fleurs et celui des Dames, idéal pour éprouver le choc asiatique, et sacrifier au shopping.
Ce voyage passionnant a bien répondu aux objectifs que le président de l’Académie avait fixés, plongeant ses membres dans les réalités culturelles, économiques et maritimes, très actuelles de la Chine, et confirmant les propos des conférenciers qui s’étaient exprimés en préparation à ce voyage. Ceux qui avaient visité ces lieux il y a seulement quelques années ne les ont pas toujours reconnus, tant l’évolution est rapide, et on peut en tirer la conclusion que l’Académie de marine ne devrait pas trop tarder à y revenir.

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