Éloge

Séance du 7 juin 2017

Eloge de Claude Douay

Cet éloge est prononcé par Francis Vallat, successeur de Claude Douay dans la section Droit et économie.

Né en 1922 à Paris, Claude Douay entame des études de droit puis se réfugie au printemps 1943 en zone sud. Il gagne un maquis en Auvergne, entre dans le réseau « Navarre », est arrêté le 25 septembre de la même année à Vichy. Selon son propre récit, il tombe dans une « souricière » tendue par des agents de la Gestapo chez Jean Sabatier ; ce dernier avait été arrêté le 22 et la Gestapo, comme à l’accoutumée, avait laissé des agents sur place au cas où quelqu’un se présenterait. C’est ce qui est arrivé à Claude Douay, qui venait chercher des fausses cartes d’identité chez Jean Sabatier. Il est interné à Vichy, puis à Buchenwald et est transféré au mois de novembre 1943 à Dora.

Dans ce camp récemment créé pour recevoir les installations de fabrication et de lancement des V2, auparavant installées à Pennemünde et détruites par un bombardement britannique, il travaille à la construction d’un tunnel destiné à recevoir les rampes de lancement puis il est affecté « au contrôle des électro-aimants pour la direction des ailerons arrières » des V2 (et il en profite pour commettre quelques sabotages). Le 5 avril 1945 il sort de Dora avec le convoi des spécialistes et le 10 il est libéré par l’armée américaine. La médaille de la Résistance et la Croix de Guerre lui seront attribuées pour ces faits.

Après avoir repris ses études de droit en 1946, il entre dans l’administration de la France d’Outre-mer et est affecté à Brazzaville. Revenu en métropole, il est affecté aux services de la marine marchande, place Fontenoy. Il est en particulier chargé à partir de 1966 du secrétariat de la Commission de réforme du droit maritime présidée par René Rodière ; il représente par ailleurs la France dans de nombreuses réunions internationales, entre autres auprès de la Conférence des Nations unies sur le commerce et le développement réunie à Genève à partir de 1964 et il participe aussi à l’élaboration de la Convention de Montego Bay.

Francis Vallat poursuit l’éloge en citant une partie du texte consacré par notre confrère Michel Roussel à Claude Douay au moment où celui-ci a quitté ses fonctions en janvier 1988 : « A ses yeux, le mouvement qui a conduit les gouvernements à prendre en main le droit maritime privé n’est pas à déplorer. Un tel changement est positif, dit-il, parce qu’il traduit une meilleure application des principes du Droit. Quant à l’extension du pouvoir des Etats sur la Mer, elle est justifiée par les enjeux tenant à la politique, à l’économie, à la stratégie et aussi à la défense de l’environnement. Mais cette extension s’est combinée avec une internationalisation du droit qui se substitue peu à peu à la coutume. C’est un progrès car le « droit du plus fort » s’en trouve limité.

A l’écouter, on comprend qu’il n’est pas loin de penser que la démarche typiquement « onusienne », dont il est un connaisseur averti, aura finalement, pour ce qui est de la mer et du domaine maritime, produit ses meilleurs fruits, même s’ils sont encore loin de la maturité.

« Au terme de ce que nous appellerons son mandat, il lui apparaît que le Droit a opéré une avance et qu’ainsi l’Humanité, engagée d’autre part dans la course à travers l’espace, a trouvé sur la mer et dans l’océan des occasions d’affirmer la primauté de la raison et du respect de l’autre.


« Le juriste s’en satisfait. Le magistrat s’en félicite. L’homme qui a rencontré si jeune la violence sans bornes y trouve un motif d’espérer. » Elu dans notre Compagnie en avril 1983, décédé en septembre 2015, Claude Douay nous laisse le souvenir chaleureux d’une personnalité hautement estimable, ouverte sur le monde, très attachée à l’art de vivre et à l’amitié.

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