Conférences

La Marine et la guerre de 1870

Jean-Pierre Bloch
Administrateur général des Affaires maritimes

Le 24-01-2018

M. Jean-Pierre Bloch, Administrateur général des Affaires maritimes, est présenté par Philippe Henrat, président de la section Histoire, lettres et arts. M. Bloch a bien voulu communiquer à l’Académie ses réflexions sur l’historiographie récente de la guerre franco-prussienne de 1870-1871. Il lui paraît que le rôle joué par la Marine française dans la défense du territoire national est oublié.

Après la déclaration de guerre par la France à la Prusse le 19 juillet 1870, la Marine assure le transfert de l’armée d’active depuis l’Algérie jusqu’en métropole et elle amène en Afrique des troupes de réserve, en particulier des inscrits maritimes, pour y maintenir l’ordre. L’escadre d’évolution de la Méditerranée assure la sécurité de ces mouvements maritimes.

En même temps l’état-major de la Marine, afin de mettre à profit la supériorité incontestable de la flotte française sur celle de la Prusse, prépare le débarquement d’un corps expéditionnaire sur la rive prussienne de la Baltique, mais le Danemark, pourtant vaincu par la Prusse lors de la récente « guerre des Duchés », refuse, sous pression de la Russie, le passage des Détroits aux bâtiments de guerre français. Il est aussi envisagé un blocus de l’estuaire de l’Elbe, mais la France ne dispose pas de la réserve de charbon nécessaire pour cette opération car la Grande-Bretagne n’accepte pas une telle installation dans le port d’Heligoland.

Le théâtre des opérations de la Marine nationale est donc restreint à la Manche et au secteur méridional de la mer du Nord. La flotte assure la protection du littoral de Dunkerque, l’accès au Havre et à Cherbourg. Les effectifs disponibles, environ 2 000 hommes avec un équipement d’artillerie, sont affectés à Paris puis au camp de Châlons.

Après la capitulation de Napoléon III à Sedan (2 septembre) puis la proclamation de la République (4 septembre) et la formation d’un gouvernement de Défense nationale, les matelots, les artilleurs et les officiers de Marine occupent une place croissante dans la conduite de la guerre. L’essentiel est la défense de Paris, assiégé depuis le 19 septembre. La Marine tient six des forts, en particulier ceux du Mont Valérien et de Montrouge, dont elle organise le commandement à l’instar des bâtiments de mer. Les artilleurs servent les chaloupes canonnières placées sur la Seine et des matelots accoutumés au maniement des filins sont affectés à la préparation des aérostats permettant la poursuite des liaisons entre la capitale et le reste du pays. Les marins participent aux combats autour de la ville, d’abord au mois d’octobre en essayant de construire un pont sur la Marne, puis à la fin de l’année lors de la bataille du Bourget. Lorsque l’armistice est signé le 28 janvier 1871 les marins refusent de laisser les forces allemandes entrer dans les forts ; ils les remettent à l’armée de Terre qui accepte les clauses de l’accord franco-prussien.

En outre les marins participent à la défense des ports lors de l’avance de l’armée ennemie. Le port du Havre, dont l’importance est considérable puisqu’il permet l’arrivée des armes et du ravitaillement, est protégé par des chaloupes disposées sur la Seine ; pour celui de Cherbourg, la Marine tient le passage de Carentan.

Les armées de la Défense nationale en province reçoivent aussi l’aide de la Marine. Chanzy, commandant l’armée de la Loire, demande l’envoi d’artilleurs. Les arsenaux de Marine sont largement mis à contribution pour obtenir des armes, du ravitaillement et tout un matériel divers, ainsi des mors pour les chevaux.

Lors du second siège de Paris (mars à mai 1871) la Marine est encore mise à contribution. La Commune tente d’organiser une brigade de marins dans la Garde nationale ; le gouvernement établi à Versailles fait appel à l’infanterie de Marine durant la « semaine sanglante » (21-28 mai) et des marins sont présents lors des combats du cimetière du Père Lachaise.

C&M 2 2017-2018

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