Conférences

Former les marins.
Une école innovante pour un enseignement maritime du futur.

François Marendet
Directeur général de l’Ecole nationale supérieure maritime

Le 20-05-2015

Former les marins.
Une école innovante pour un enseignement maritime du futur.


Mme Odier présente le conférencier de ce jour, M. François Marendet, dont elle souligne la double expérience du terrain et de l’administration. M. Marendet a été directeur d’exploitation du port de Boulogne de 1984 à 1986, puis successivement sous-directeur des ports à l’administration centrale, conseiller technique au cabinet de Dominique Bussereau, président du directoire du port de Nantes ‒ Saint-Nazaire, et enfin directeur général de l’Ecole nationale supérieure maritime depuis novembre 2012.

Celle-ci œuvre avec d’autres établissements, en particulier l’Ecole supérieure de Nantes, au maintien d’un savoir maritime en France, dans la tradition des hydrographes et des Ecoles nationales de la marine marchande, dont plusieurs rapports (Poséidon, Laurent, Cluster) ont monté la pertinence, tout en insistant sur une nécessaire évolution vers la formation d’un « ingénieur de la mer ». Après une création mouvementée en 2010 s’est ouvert le temps de la stabilisation et de la gouvernance ; on est arrivé maintenant à la consolidation.

Celle-ci repose sur le partage de valeurs et sur la définition d’une vocation pour chacun des sites de l’établissement. M. Marendet relève quatre valeurs communes : 1. La volonté de faire fructifier l’héritage des « Hydros » ; 2. Etre un acteur de la mondialisation en toute responsabilité ; 3. Promouvoir l’ouverture d’esprit, le respect, l’honnêteté, la loyauté, l’humilité, la polyvalence, le sens des responsabilités, la confiance en l’autre, la solidarité et la promotion sociale ; 4. Appliquer ces valeurs à l’administration de l’Ecole. Le projet de partage entre les quatre sites de l’établissement est élaboré ainsi que suit : Marseille accueille les trois premières années (L1 à L3) des promotions d’élèves ingénieurs (navigants et para-maritimes) ; Le Havre reçoit les deux dernières années et demie (S7, M1 et M2) des ingénieurs navigants ainsi qu’un mastère « logistique » et un pôle international d’enseignement maritime ; Nantes accueillera les deux dernières années (M1 et M2) des ingénieurs para-maritimes, tandis que la filière professionnelle « pont » y sera maintenue, ainsi que la formation des chefs mécaniciens, jusqu’en septembre 2017. A cette date elle sera transférée à Saint-Malo, qui disposera en outre d’un renforcement de la filière professionnelle machine et d’une confirmation des formations en matière de sécurité.

Le projet d’établissement prévoit trois directions pour l’avenir : placer la pédagogie au cœur du projet ; élaborer un projet immobilier pouvant évoluer ; se donner les moyens du développement. Pour la pédagogie, il faut moderniser les procédures du recrutement des élèves et adapter le cursus aux contraintes des embarquements, faire de la filière professionnelle le moteur de l’enseignement maritime, proposer une pédagogie par la recherche et des projets, accompagner l’évolution du corps professoral vers l’adaptation aux métiers de l’ENSM, enfin renforcer le rôle du conseil des études. Pour l’immobilier il convient de disposer de locaux pérennes, respectueux des normes, tout en veillant à diminuer ou à mutualiser les coûts de fonctionnement. Le Havre, ayant le bénéfice d’un nouvel équipement, doit devenir la vitrine de l’enseignement maritime international ; Marseille doit s’adapter à la pédagogie numérique et Saint-Malo s’intégrer dans le pôle universitaire malouin. Pour obtenir les moyens nécessaires il convient de créer des conseils locaux de développement réunissant les acteurs du monde maritime et para-maritime, c’est-à-dire l’Etat, les collectivités territoriales, les établissements d’enseignement supérieur, les entreprises du secteur et des personnes qualifiées autour de l’ENSM et de ses projets. Il faut aussi assainir le passif hérité de la formation de l’école, développer de nouvelles ressources en formation continue, initier des partenariats publics et privés pour les équipements lourds, promouvoir l’école pour attirer des élèves français et étrangers.

La consolidation de l’école doit s’appuyer sur une vie associative féconde avec un encouragement à des projets d’élèves sélectionnés et aidés par un comité technique. La recherche de qualité est essentielle et elle s’appuie sur un processus de certification ISO 9001 pour le titre d’ingénieur ; la première visite achevée au début de février 2015 n’a pas relevé de non-conformités majeures ; elle a constaté cinq non-conformités mineures à corriger d’ici la prochaine visite de surveillance dans un an. Tous ces plans d’action s’inscrivent sur un tableau de bord, véritable outil de pilotage pour la direction générale et le conseil d’administration. Il faut en outre pouvoir s’appuyer sur des équipements récents, en particulier des simulateurs de navigation.

Au-delà de ces réalisations immédiates, la consolidation de l’école s’appuie sur des projets innovants pour l’avenir. Le premier et le plus important est l’aménagement de la nouvelle école du Havre avec environ 10 000 m² bâtis, dont 6 600 m² de locaux d’enseignement, et une capacité d’accueil de 800 étudiants, permettant une complémentarité avec d’autres structures, en particulier l’enseignement supérieur. Le dispositif pédagogique repose sur l’installation d’un simulateur « navire » permettant une pédagogie interactive entre les différents organes d’un navire (machine, passerelle, radar, …), sur l’interconnexion des simulateurs installés, ainsi que sur l’achat d’autres équipements pédagogiques de matériel électronique, électrotechnique et automatique. Il est en outre prévu des recrutements de personnels qualifiées, à savoir un technicien supérieur de maintenance, un administrateur informatique et réseaux, un documentaliste, un agent « gestion vie scolaire ».

Le second projet est le développement du Centre d’abandon et de survie en mer (CESAME) situé à Saint-Malo. Il s’agit d’offrir aux élèves de l’ENSM un choix élargi de formations avec des spécialités « éoliennes en mer » et « offshore » tout en développant la recherche sur les possibilités de la survie en mer. Une étude est poursuivie avec la région Bretagne, Saint-Malo agglomération et la ville de Saint-Malo pour une installation sur un terrain proche des installations existantes sur le quai Bouvet ; parallèlement une étude juridique et financière est engagée avec Falck, partenaire privé danois ayant une grande expérience dans ce domaine. La remise de ces deux études est prévue pour la fin du présent mois de mai avec une ouverture du centre agrandi dans le courant du second semestre de 2016.

Le troisième projet est une refonte du cursus en y introduisant davantage de matières maritimes et en offrant aux élèves deux nouvelles formations para-maritimes, « l’ecoship manager » et « l’offshore maintenance manager ». La première œuvre pour un navire écologiquement propre et économique efficient, tant pour la construction et l’exploitation que pour la déconstruction. La seconde vise à la gestion de projets complexes pour l’exploitation des hydrocarbures, du gaz et des énergies marines renouvelables.

A côté de ces projets d’avenir il est nécessaire de poursuivre la résolution de difficultés quotidiennes, ainsi le recrutement des enseignants, pour lesquels il faudrait développer l’attractivité du métier, et encore une adaptation aux contraintes budgétaires nécessitant d’accroître les ressources propres (droits d’inscription, taxe d’apprentissage, formation continue…).

En conclusion M. Marendet formule deux vœux : mieux communiquer sur les métiers sur lesquels débouchent les formations de l’ENSM, tant ceux de navigant que ceux du para-maritime ; avoir une plus grande ouverture vers l’international, en particulier les autres centres de formation en Europe.

Questions

Edouard Berlet. – Quels sont les effectifs d’entrée et de sortie ? R. Il y a 180 places par an, dont 2/3 pour les navigants, 1/3 pour le para-maritime ; le recrutement est de plus en plus difficile car les candidats manquent de culture générale. L’effectif de sortie est de 100 à 120 par an. Comment appliquez-vous les directives européennes ? R. Il n’y a pas de directive européenne en la matière. Quels les rapports avec l’Ecole navale ? R. Ils sont excellents.

Lars Wedin. – Quel est le profil recherché ? R. Il n’y a pas de profil recherché. Les origines des candidats sont très diverses.

Arnaud Réglat-Boireau. – Dans le recrutement pour le centre de Marseille il semble qu’une partie des candidats n’est pas motivée. R. Il a été introduit dans les épreuves du concours un entretien de motivation avec les membres du jury ainsi qu’un résumé en français d’un texte anglais.

Bernard Cassagnou – Trouver des stages pour les élèves est difficile. Certains se présentent au concours de recrutement sans avoir navigué. R. Oui, car les armateurs français hésitent à mettre des élèves français sur leurs navires portant un pavillon étranger. Cependant on observe une amélioration et les armateurs acceptent de mettre des stagiaires sur des navires plus petits.

C&M 3 2014-2015

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